Le petit chien…

immobileFeu rouge, pour un instant l’immobilité. Temps mort pour certains. Temps perdu pour d’autres. Temps riche pour moi. Une pause. Les mains sur mon guidon, le col remonté, il fait un peu frais, je regarde à droite la devanture du bureau de tabac. Que je connais par cœur, pour m’arrêter à ce feu une fois par jour au moins.

Je tourne la tête à gauche. Mes yeux rencontrent ceux d’un petit chien, assis sur le siège avant de la voiture arrêtée aussi au feu. Une petit chien avec des poils gris autour des yeux. Un petit chien vieux. Je ne vois de son maître que les jambes, et la main crispée sur le levier de vitesse.

Mes yeux s’arriment à ceux du petit chien. Et ne cillent pas. Un échange de regard. Intense. Rempli d’amour. Le temps s’est arrêté. Le temps pourrait ne pas exister. Pour moi l’humaine, je garde une petite place dans ma tête pour le feu qui passera au vert, qui me fera démarrer à nouveau et continuer le cours de ma journée.

Pour le petit chien, rien d’autre n’existe que cet instant qui dure et durant lequel nous ne faisons qu’un, lui et moi. Je vous vois sourire. Oui, je sais, ça paraît ridicule. Tous ces grands mots pour un petit chien vieux. Mais le fait est que durant ce temps riche du feu rouge, le petit chien et moi n’avons fait qu’un.

Comment expliquer… Ce n’est pas la première fois que mes yeux croisent ceux d’un chien et y trouvent de l’amour. Je pourrais même dire, cela arrive presque à chaque fois. Les chiens sont tellement avides d’interaction avec les humains, toujours prêts à donner et recevoir un échange affectueux. La différence cette fois-ci réside peut être dans le fait que j’ai oublié qui j’étais. J’ai oublié de regarder le chien avec mes yeux d’humaine, avec son passé plein d’histoires et son présent affairé. L’humaine qui pédale sur son vélo, qui va donner son cours de yoga.

Je n’étais plus que des yeux rencontrant d’autres yeux. Comme si je sentais la vie en lui qui sentait la vie en moi. Instant de suspension, instant d’une extraordinaire intensité.

Le feu est passé au vert. J’ai détourné la tête et ai démarré. Le sentiment de séparation est revenu. J’ai perdu de vue le petit chien, mais ses yeux sont restés en moi. Le souvenir de ce moment est resté et me rend heureuse. Comme une idée du paradis perdu de vue.


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Commentaire

Le petit chien… — 2 commentaires

  1. J’adore l’expression « le petit chien vieux » – les mots sont banals mais on n’a pas l’habitude de les assembler comme ça. Du coup, il devient tout de suite très réel et très sympa, ce p’tit chien ! Et je le fais entrer illico dans le coin de ma tête occupé par Les Histoires de Sylvie (il y sera en bonne compagnie ;-)).

    • Merci Gwen :-) Un petit chien, une souris, une mouette, et quelques oies, ça devrait faire bon ménage :-)

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